Résilience du venture et ralentissement du growth lié au repli des levées et investissements de grande taille
France Invest publie ce jour son étude sur l’activité des fonds de venture & growth en 2023, à savoir les chiffres des levées de capitaux, y compris par type de souscripteurs, et d’investissements.
Bertrand Rambaud, président de France Invest, commente : « Nous constatons sans réelle surprise que les chiffres de levées et d’investissements des fonds de venture et de growth en 2023 sont en retrait, comme le reste de l’activité du secteur. Les conditions économiques sont indéniablement plus complexes pour les levées de grande taille notamment en growth, au vu des contraintes des investisseurs institutionnels. Nous constatons toutefois avec intérêt la part que les entrepreneurs et les family offices ont prise en quelques années dans les levées de venture et de growth : ils sont même les principaux souscripteurs du segment en 2023. On relève également une certaine résilience des activités de venture, avec un nombre conséquent de levées de taille plus modeste. Côté investissements, les opérations de grande taille sont en baisse mais les opérations sur des tickets plus petits sont restées dynamiques, notamment pour accompagner des start-up déjà en portefeuille. Si l’on regarde une période plus longue, l’évolution du segment du venture et du growth français depuis 2016 est spectaculaire : c’est devenu en quelques années un outil puissant, diversifié, dense et attractif à même d’accompagner un écosystème entrepreneurial français fort et innovant. Le venture & growth français reste néanmoins en retrait sur les plus grosses opérations en France puisqu’il représente moins de 30 % des financements apportés aux start-up et scale-up françaises depuis 2016 si on se réfère aux chiffres d’EY. »
A retenir : Dans un contexte plus complexe pour le financement des start-up et scale-up depuis 2022, les levées et investissements se sont comme attendu contractés en 2023 – restant toutefois à des niveaux élevés historiquement en montant comme en nombre d’opérations. La tendance baissière est marquée pour les levées et des opérations de grande taille, notamment en growth. L’activité venture témoigne cependant d’une certaine résilience, avec de nombreuses levées ou closing inférieurs à 100 M€, soutenus par l’investissement des entrepreneurs et family office.
- 3,6 Md€ ont été investis dans 1 319 entreprises et projets d’infrastructure ;
- 3,6 Md€ ont été levés, notamment auprès des personnes physiques et family offices et du secteur public.
1. Investissements : dans le sillage du ralentissement observé sur le marché du capital-investissement français[1], l’activité du venture & growth dans son ensemble se contracte en 2023 du fait du retrait des opérations de grande taille.
3,6 Md€ ont été investis dans 1 319 start-up en 2023, soit un retrait de 29 % en montants et de 3 % en nombre par rapport à 2022. Ce niveau d’activité reste néanmoins élevé par rapport aux données historiques : les montants investis ont été multipliés par 4 depuis 2016 et le nombre d’entreprises accompagnées par 2.
Le segment growth est le plus touché par ce ralentissement : -38 % en montants investis contre –22 % pour le venture. Cela s’explique par le retrait des opérations de grande taille (les tickets d’investissements supérieurs à 15 M€ ont été divisés par près de 2 par rapport à la période 2021/2022).
Notons néanmoins que les investissements inférieurs à 15 M€ se maintiennent au même niveau que les deux dernières années (2,4 Md€ en 2023 contre 2,5 Md€ en moyenne par an en 2021 et 2022) ce qui illustre une forme de résilience d’une grande partie du marché français.
Par ailleurs, la part des opérations secondaires ou de réinvestissements en soutien aux entreprises déjà accompagnées a augmenté en montants et en nombre en 2023 par rapport à la période 2016-2022 (72 % des montants et 61 % du nombre d’opérations en 2023 contre 59 % et 54 % entre 2016 et 2022) signe d’une volonté d’accompagner dans la durée les entreprises en portefeuille dans un contexte de levées de fonds plus difficile, contexte qui pèse également sur les opérations primaires.
Enfin, rapportés aux chiffres du rapport d’EY sur le financement des start-up et scale-up françaises, les acteurs français du venture & growth représentent en moyenne 29% des montants investis depuis 2016 et 28 % en 2023. Ce poids s’explique notamment par la faible présence des investisseurs financiers français dans le financement des plus grosses opérations, au profit d’investisseurs étrangers.
2. Levées : Après 3 années dynamiques de 2020 à 2022, les levées ralentissent en 2023, impactées par la forte baisse des levées supérieures à 100 M€.
Les levées de capitaux sont en baisse de 35 % par rapport à 2022 et s’établissent à
3,6 Md€ en 2023. La contraction du segment growth est particulièrement marquée (-50 % contre –21 % pour le venture). Ce ralentissement s’inscrit après 2 années de reprise particulièrement dynamique. Toutefois, les levées de moins de 300 M€ se maintiennent à des niveaux élevés en montants collectés et en nombre de fonds.
Concernant les souscripteurs :
- En 2023, les principaux souscripteurs sont les personnes physiques[2] et Family Office (26 % des levées en 2023, 960 M€) et le secteur public (22 % des levées en 2023, 794 Md€), confirmant ainsi l’intérêt porté depuis plusieurs années aux financements des start-up ;
- Les levées de ces souscripteurs affichent ainsi une certaine résilience alors que les engagements des industriels et des fonds de fonds, ont connu une forte baisse en 2023 (respectivement –64 % et –63 % vs. 2022) en l’absence de levées de grande taille ;
- Parallèlement, avec la fin du déploiement de l’initiative Tibi, les engagements des assureurs (455 M€, 7 % des levées en 2023 vs. 13 % en 2022), et des caisses de retraites (65 M€, -20 % vs. 2022) poursuivent leur diminution amorcée l’année dernière, après avoir fortement cru en 2020 et 2021.
Les capitaux levés à l’étranger ont diminué en 2023 (-48 % vs. 2022), tout comme leur part dans les levées totales (17 % en 2023 vs. 21 % en 2022 et 38 % en 2021), ce qui s’explique notamment par l’absence de levées de grande taille.
Les levées en biotech sont également particulièrement affectées (70 M€ en 2023 contre 493 M€ en 2022 et 1 414 M€ en 2021).
3. Impact économique et social du segment venture & growth
189 sociétés de gestion sont actives sur le segment du venture & growth, parmi les 440 adhérents de France Invest.
- À fin 2022, 3 663 start-up et scale-up sont accompagnées par des acteurs français du venture et du growth, dont 2 619 françaises qui emploient près de 122 000 personnes ;
- Ces entreprises sont réparties sur l’ensemble du territoire français avec une concentration en Île-de-France (43 % des 2 619 start-up françaises) ;
- Plus de 13 000 emplois créés en 2022* dans les start-up françaises accompagnées (+21 % sur un an vs. +6,9 % pour les entreprises accompagnées par le capital-investissement français et +1,8 % pour l’emploi dans le secteur marchand français).
[1] Voir Activité des acteurs français du capital-investissement 2023 disponible sur le site de France Invest
[2] Les souscriptions des personnes physiques à des fonds de venture & growth se réalisent en grande majorité au travers de véhicules accessibles uniquement aux investisseurs professionnels et dont les tickets d’investissements minimums sont de 100 000 €.